Le point de départ de l’action récursoire du constructeur

Le point de départ de l’action récursoire du constructeur

Publié le : 06/04/2023 06 avril avr. 04 2023

Il n’est pas rare qu’un entrepreneur, dont la responsabilité est reconnue pour avoir utilisé des matériaux viciés, engage la responsabilité du vendeur, ou du fabricant, desdits matériaux. Pour cela, il bénéficie d’une action récursoire sur le fondement de la garantie des vices cachés, enserrée dans un double délai. D’une part, l’article 1648 du Code civil prévoit un délai de 2 ans pour agir en garantie des vices cachés, à compter de la découverte du vice. D’autre part, l’article L.110-4 du Code de commerce prévoit un délai de prescription de 5 ans, à partir de la vente initiale. 

Cependant, une action tardive du maître d’ouvrage à l’égard de l’entrepreneur pourrait le priver de se retourner contre son vendeur, ou le fabricant du matériel litigieux. Se pose alors la question du point de départ de l’action récursoire du constructeur, en matière de vices cachés, pour laquelle la troisième chambre civile a réaffirmé sa position le 8 février 2023.


Dans le cadre de la construction d’une maison, un couple a confié à un entrepreneur la fourniture et l’installation d’un système de ventilation mécanique contrôlée (VMC). Après la réception des travaux, un incendie s’est déclaré dans les combles, pour lequel les expertises ont mis en cause ladite VMC. 

L’entrepreneur, condamné, a exercé une action récursoire à l’égard du vendeur et du fabricant de la VMC litigieuse, condamnés par la Cour d’appel. 

La société venderesse et la société fabricante ont alors formé un pourvoi en cassation. En effet, elles arguaient que l’action en garantie des vices cachés étant encadrée par un double délai, l’action récursoire a été exercée tardivement par rapport au délai de prescription courant depuis la vente initiale.

La Cour de cassation rejette le pourvoi en estimant que, dans le cadre d’une vente conclue avant la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, le constructeur, dont la responsabilité a été retenue pour avoir utilisé des matériaux ou éléments viciés, doit pouvoir exercer une action récursoire contre le vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés.

Pour ce faire, son action est encadrée par un double délai de 2 ans à compter de la découverte du vice, et un délai de 5 ans depuis la vente initiale. Cependant, la Haute juridiction affirme que le délai de l’article L.110-4 du Code de commerce, courant à compter de la vente initiale, est suspendu jusqu’à ce que la responsabilité du constructeur soit recherchée par le maître d’ouvrage. Le point de départ de l’action est alors fixé à l’assignation de l’entrepreneur. 

Défendant le droit d’accès au juge des entrepreneurs, la troisième chambre civile maintient sa divergence de position avec la première chambre civile et la chambre commerciale. Ces dernières considèrent qu’en matière commerciale, l’action en garantie des vices cachés, devant être exercée dans les 2 ans de la découverte du vice, est aussi enfermée dans un délai de prescription de 5 ans, dont le point de départ est la vente initiale, peu importe la date d’assignation de l’entrepreneur. 


Référence de l’arrêt : Cass. civ 3ème du 08 février 2023, n°21-20.271.
 

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