Succession : rappel sur l'essence de la donation-partage

Succession : rappel sur l'essence de la donation-partage

Publié le : 18/08/2023 18 août août 08 2023

La donation-partage permet la répartition des biens du donateur entre ses héritiers présomptifs. Les biens transmis ne sont pas rapportables à la succession contrairement aux biens ayant fait l’objet d’une donation simple, dont la valeur doit être fictivement réintégrée dans la masse à partager afin de rétablir l’équilibre entre les héritiers.

S’il s’agit d’un outil de choix pour s’assurer du respect des droits de chaque enfant et amoindrir les conflits, il convient d’être attentif lors de la réalisation de l’acte. À défaut de respecter les conditions précises relatives à la réalisation d’une donation-partage, l’opération risque la requalification en donation simple, ainsi que l’a récemment rappelé la Haute juridiction.


Les faits ayant abouti à la saisine de la Cour de cassation débutent en 1995 par une « donation-partage anticipée » entre un père et ses enfants. Par cet acte authentique, le père attribuait à sa fille, issue d’une première union, la propriété de quatre biens mobiliers, et à chacun de ses fils, né d’une deuxième union, la nue-propriété de la moitié indivise d’un bien immobilier.

L’un des fils a décidé de céder à son frère sa quote-part indivise en nue-propriété du bien immobilier, par un acte authentique reçu en 2008 au titre duquel le père était intervenu en qualité de donateur.

Après le décès du père, la succession ouverte entre la fille, les fils et la femme du défunt a connu des désaccords au cours des opérations de comptes, liquidation et partage, au point que la fille a assigné les cohéritiers en partage judiciaire, notamment parce qu’elle estimait que la donation-partage réalisée en 1995 devrait être requalifiée en donation ordinaire.

Elle a obtenu satisfaction auprès de la Cour d’appel qui a requalifié la donation-partage en donation simple, emportant le rapport de celle-ci à la succession et l’appréciation de sa valeur au moment du partage, conformément à l’article 860 du Code civil. L’arrêt soulignait que le père n’avait pas été à l’initiative de l’acte de 2008 et que le partage n’avait pas été réalisé sous sa médiation.

Considérant que le juge du fond avait ajouté une condition qui n’était pas prévue par la loi, les défendeurs ont formé un pourvoi en cassation.  En effet, aux termes de l’article 1075 du Code civil, toute personne peut faire, entre ses héritiers présomptifs, la distribution et le partage de ses biens et de ses droits sous forme de donation-partage. En outre, le deuxième alinéa de l’article 1076 du même code autorise la réalisation de la donation-partage par actes séparés, pourvu que le disposant intervienne aux deux actes.

La Cour de cassation confirme le raisonnement de la Cour d’appel et considère que malgré la possibilité de réaliser une donation-partage par actes séparés, il est nécessaire que la répartition des biens soit effectuée par le disposant lui-même, ou au moins sous sa direction et avec son concours.

Ainsi, l’acte de donation, consenti en 1995, qui se contente d’attribuer des droits indivis ne peut en soi opérer un partage. De plus, l’acte procédant au partage matériel en 2008 résulte de la volonté des copartagés, et non de celle du donateur. Par conséquent, l’acte de 1995 peut être requalifié en une donation simple, rapportable à la succession litigieuse.

Cet arrêt s’inscrit dans une volonté de la Haute juridiction de confirmer, depuis plusieurs années, l’essence de la donation-partage, laquelle doit exclusivement contenir des lots divis et impliquer du donateur un rôle directeur et déterminant dans la composition des lots.


Référence de l’arrêt : Cass. civ 1ère du 12 juillet 2023, n°21-20.361

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